En amont du livre, le manuscrit (d'après Hubert Nyssen)

En amont du livre, le manuscrit (résumé d’après Du texte au livre, les avatars de sens, Hubert Nyssen, Collection Le texte à l’œuvre, Edition Armand Colin)

Aujourd’hui plus de dix mille manuscrits d’inconnu sont envoyés chaque année aux éditeurs français lesquels n’en retiennent pas un sur mille.

Crissement de la plume, clapotis du clavier : rituels pour accéder à l’éditeur et ses mystères. Il devrait y avoir coercition contre les écrivains ineptes et inutiles comme il y en a pour les vagabonds et les fainéants ; « l’écrivaillerie semble être symptôme d’un siècle débordé » assurait déjà Montaigne.

Cependant le monde éditorial n’en finit pas d’entretenir la confusion. Sa vocation initiale qui était de faire découvrir des œuvres est submergée par l’ambition commerciale. De plus, l’exploitation dela violence, de la sexualité, de la peur, la misère, par les journaux, la télévision, le net, a dérobé aux auteurs le pouvoir de surprendre.  Aussi, il faut trouver de nouvelles formes et suggérer de nouvelles analyses.

D’un côté se trouvent les ouvrages que leur sauteurs proposent à l’édition, et de l’autre ceux que les éditeurs découvrent. Le texte de l’auteur inconnu, ne sera pas éliminé et sera lu seulement s’il scintille. Dans les pages ouvertes au hasard, il faut que l’écriture, la narration, ou le sujet capturent l’intérêt du débroussailleur. Ce tri n’est pas sorcier, assurent les responsables de cette tache dans les maisons d’éditions. Des manuscrits entrouverts disent-ils encore, monte tout de suite une odeur éloquente : parfum exquis ou relent détestable.

Pourtant l’objectif lecteur reste indispensable. La première lecture agit donc comme un filtre.

Il en va donc du livre comme pour les enfants. À ceux que l’on n’attendait pas, il faut de l’envergure et du tempérament pour s’imposer.