Conseils des plus célèbres écrivains

Maupassant

Le lecteur qui cherche uniquement dans un livre à satisfaire la tendance naturelle de son esprit, demande à l’écrivain de répondre à son goût prédominant, et il qualifie invariablement de remarquable ou de bien écrit l’ouvrage ou le passage, qui plaît à son imagination idéaliste, gaie, grivoise, triste, rêveuse ou positive. En somme, le public est composé de groupes nombreux qui nous crient :

-Consolez-moi.

-Amusez-moi.

-Attristez-moi.

-Attendrissez-moi.

-Faites-moi rire.

-Faites-moi frémir.

-Faites-moi rêver.

-Faites-moi pleurer.

-Faites-moi penser.

Patrick Modiano

Un romancier ne peut jamais être son lecteur, sauf pour corriger dans son manuscrit des fautes de syntaxe, de répétitions, ou supprimer un paragraphe de trop. Il n’a qu’une représentation confuse et partielle de ses livres, comme un peintre occupé à faire une fresque au plafond, et qui allongé sur un échafaudage travaille dans les détails, de trop près, sans vision d’ensemble. Curieuse activité solitaire que celle d’écrire. Vous passez pas de moments de découragement quand vous rédigez les premières pages d’un roman. Vous avez chaque jour, l’impression de faire fausse route. Et alors, la tentation est grande de revenir en arrière et de vous engager dans un autre chemin. Il ne faut pas succomber à cette tentation mais suivre la même route. C’est un peu comme d’être au volant d’une voiture, la nuit en hiver et rouler sur le verglas sans aucune visibilité.

Rainer Maria Rilke

« il n’est qu’un seule chemin. Entrez en vous-même, cherchez le besoin qui vous fait écrire : examinez s’il pousse ses racines au plus profond de votre cœur. Confessez-vous à vous-même : mourriez-vous s’il vous était défendu d’écrire ? Ceci surtout : demandez-vous à l’heur la plus silencieuse de la nuit : «  Suis-je vraiment contrait d’écrire ? «  Creusez en vous-même vers la plus profonde réponse.

Lettres à un jeune poète

Gustave Flaubert

« Les difficultés de style m’épouvantent. Cela fait cinquante-six mois que je travaille à ce roman. Mais j’en suis sûr : ma Bovary sera un tour de force inouï, prodigieux. Ce sera, je crois, la première fois  que l’on verra un livre qui se moque de  sa jeune première et de son jeune premier. Mais l’ironie n’enlève rien au pathétique. J’espère bien qu’on comprendra : ma Bovary est un œuvre surtout de critique ou plutôt d’anatomie. Le lecteur ne s’en apercevra, je l’espère de tout le travail psychologique caché sous la forme mais il en ressentira l’effet.. je veux traiter l’âme humaine avec l’impartialité que l’on met dans les sciences physiques. Je veux que mon roman soit écrit avec une absence totale d’idée morale.

Correspondances à propos de Madame Bovary

Victor Hugo

Focalisé sur notre désir d’histoire et de contenu, on oublie trop souvent de penser à la forme d’y réfléchir, peut-être même avant l’écriture du manuscrit. Il y a tant de questions à se poser : mon texte sera-t-il chapitré , quel temps vais-je utiliser ? Et le narrateur, un « je » ou omniscient ? Y répondre permet de résoudre de gros problèmes qu’il vaut mieux avoir avant l’écriture que pendant… »

Utilité du beau et autres textes